Selon un rapport récent publié par Ecofin Pro, près de 700 millions d’Africains ne sont toujours pas connectés à Internet. Pour remédier à cette situation, il est proposé d’alléger les charges fiscales des usines d’assemblage locales afin de favoriser la production de smartphones abordables. Cependant, il existe d’autres alternatives pour stimuler l’adoption d’appareils adaptés au haut débit.

Le rapport souligne que la fabrication de smartphones abordables en Afrique reste coûteuse en raison du manque de maîtrise de la chaîne de valeur par les investisseurs dans ce domaine. Ainsi, la suppression des charges fiscales pesant sur les producteurs locaux pourrait être une solution viable pour réduire le coût de ces appareils.

Le rapport intitulé « Fabriquer des smartphones en Afrique, une stratégie gagnante ou une fausse bonne idée ? » met en évidence l’importance de l’accès des Africains à des smartphones adaptés au haut débit pour tirer parti de l’économie numérique. Selon les prévisions, cette économie pourrait représenter 5,2% du PIB du continent d’ici 2025, soit plus de 180 milliards de dollars, et atteindre 712 milliards de dollars d’ici 2050.

Cependant, la majorité de la population africaine éprouve des difficultés à accéder à des smartphones en raison de leur pouvoir d’achat et des prix de vente élevés. Alors que selon la Banque mondiale, 85% des Africains vivent avec moins de 5,50 dollars par jour, l’Union internationale des télécommunications (UIT) souligne que les smartphones restent très chers dans les pays pauvres et en développement, notamment en Afrique.

Dans certains marchés, leur acquisition peut représenter jusqu’à 60% du revenu mensuel.Malgré les efforts des grands fabricants tels qu’Apple, Samsung, Huawei et Transsion pour proposer des smartphones à bas prix, ces appareils restent toujours inaccessibles pour de nombreux Africains. C’est pourquoi près de 700 millions d’Africains ne sont pas encore connectés à Internet, bien que le taux de couverture mobile atteigne près de 90%.

Face à ce nombre considérable de personnes qui nécessitent encore des équipements, de nombreux investisseurs voient une opportunité et se lancent à nouveau dans la production locale d’appareils mobiles adaptés au haut débit, après quelques échecs entre 2012 et 2016.

Les investisseurs visent à produire des smartphones abordables pour les populations locales, afin de réduire l’exclusion numérique de plusieurs centaines de millions d’Africains causée par les prix élevés des grandes marques. Il convient de noter que cela ne concerne pas encore la fabrication locale complète des smartphones, mais plutôt leur assemblage sur place. La fabrication complète impliquerait la production de toutes les composantes physiques nécessaires à la fabrication d’un smartphone sur le continent, ce qui requiert des ressources importantes, notamment des laboratoires de recherche et développement et des chaînes de production de pièces.

Parmi les initiatives africaines, le rapport de Muriel Edjo mentionne la société angolaise LiraLink Tecnologia, qui s’est associée à l’entreprise chinoise ZTE pour établir une usine de montage de smartphones en Angola. L’usine, qui devrait être opérationnelle en 2024, se concentrera sur la production d’appareils 4G et 5G.En mai dernier, l’opérateur télécom kényan Safaricom a également annoncé son intention d’investir dans une usine de montage de smartphones en collaboration avec son concurrent Jamii Telecommunications et l’entreprise chinoise Shenzhen TeleOne Technology. L’intérêt croissant des investisseurs pour la production locale a commencé dès 2019, grâce à l’adoption rapide de nouvelles technologies mobiles telles que la 4G et la 4G+ et à l’augmentation de la consommation de données mobiles qui en a résulté. Cette tendance s’est renforcée en 2020 avec l’explosion de la consommation due à la pandémie de coronavirus. Cependant, les opinions restent partagées quant à l’efficacité de la production locale de smartphones pour améliorer l’inclusion numérique.

Le Kenya montre l’exemple à suivre en matière de réduction des charges fiscales pour les producteurs locaux, ce qui pourrait contribuer à la fabrication locale d’appareils abordables. Sous l’impulsion du président William Ruto, le pays s’est engagé à rendre accessible à tous un smartphone de qualité pour moins de 50 dollars, afin de favoriser l’inclusion numérique.Le président kényan a déclaré : « Le smartphone le moins cher coûte entre 10 000 et 15 000 shillings kényans (72 $ à 108 $). Nous pouvons réduire les taxes à 3000 shillings kényans (22 $), ce qui permettrait d’obtenir un prix final pour le smartphone assemblé localement entre 6500 et 7000 shillings kényans (47 $ à 51 $) ».

Dans ce contexte, Safaricom Venture a souligné la nécessité de supprimer la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) à l’importation, l’accise sur les téléphones mobiles assemblés ou fabriqués localement, ainsi que la TVA sur la vente des appareils, afin de soutenir la vision présidentielle.

Il est encourageant de constater que la suppression de ces taxes a été prise en compte dans les discussions, comme l’a mentionné M. Ruto lors du lancement de la plateforme des services numériques du gouvernement le 30 juin dernier. Il a exprimé sa confiance en déclarant : « Nous sommes sur la bonne voie avec nos opérateurs téléphoniques pour nous assurer qu’avant le mois d’août 2023, nous aurons des smartphones abordables ».

En plus de l’allègement des charges fiscales pour les producteurs locaux, le rapport souligne qu’il existe plusieurs autres alternatives pour rendre les smartphones plus accessibles à un plus grand nombre d’Africains. Déjà, il faut qu’il y ait une réduction de la fiscalité sur les smartphones importés : Certains pays comme le Tchad, l’Algérie et le Sénégal ont déjà adopté cette mesure pour rendre les smartphones importés plus abordables.

Par ailleurs, il faut penser à mettre en place des programmes d’achat à crédit proposés par les opérateurs : Les opérateurs de télécommunications peuvent mettre en place des programmes permettant aux utilisateurs d’acheter des smartphones à crédit, ce qui facilite leur acquisition pour les populations à revenu limité. Il faudrait aussi un subventionnement gouvernemental : Les gouvernements peuvent subventionner l’acquisition de smartphones par des groupes de populations moins favorisés, en utilisant le fonds de services universels des télécommunications. Cela permet de réduire le coût d’achat pour ces populations et favorise ainsi leur inclusion numérique.