Au Cameroun, les consommateurs sont à bout de patience. Depuis plusieurs mois, les plaintes fusent sur la piètre qualité des services de télécommunications, entre coupures intempestives, débits en berne et communications hachées. Face à la colère grandissante du public, les opérateurs tentent de justifier cette situation alarmante, pointant du doigt des problèmes d’infrastructure. En ligne de mire : la fibre optique, ce pilier essentiel du réseau qui alimente le pays en connectivité.

Un affrontement public entre opérateurs

Au cœur de la tourmente, un bras de fer s’est engagé entre Camtel, l’opérateur public en charge du réseau national de fibre optique, et Orange Cameroun, l’un des principaux fournisseurs de services mobiles et Internet. Orange accuse Camtel de ne pas garantir une transmission stable et fiable, évoquant des coupures répétées qui entravent la qualité de ses services.

Mais Camtel rejette catégoriquement ces accusations. Dans un communiqué cinglant, l’entreprise publique déclare que la dégradation des services d’Orange relèverait plutôt des choix techniques de ce dernier. Elle l’accuse notamment de s’appuyer uniquement sur la fibre noire, une solution qui, bien que performante, ne disposerait pas de redondance automatique en cas d’incident. Camtel assure qu’Orange aurait pu éviter bien des désagréments en optant pour d’autres alternatives, comme les capacités managées, qui garantissent une continuité de service même en cas de panne.

« Tous les opérateurs mobiles exploitent le même réseau de transport, mais chacun choisit sa stratégie de sécurisation », rappelle Camtel, laissant entendre qu’Orange aurait pu mieux anticiper les risques liés à l’exploitation de la fibre optique.

Un problème plus vaste que le simple conflit entre entreprises.

Si ce duel public entre les deux géants du secteur attire l’attention, il met surtout en lumière une crise plus profonde. En réalité, l’ensemble du réseau national de fibre optique est fragilisé. MTN, autre acteur majeur du marché, a lui aussi fait état de perturbations récurrentes, tandis que l’Agence de Régulation des Télécommunications (ART) s’est alarmée, chiffres à l’appui, de la baisse de qualité des services à l’échelle nationale.

Le gouvernement, de son côté, est conscient de la situation. En 2024, il avait d’ailleurs commandité un audit sur l’état de l’infrastructure. Une enquête qui a confirmé les difficultés structurelles du réseau, notamment le vieillissement de certaines installations et le manque d’investissements pour assurer leur modernisation.

Camtel, un opérateur sous pression

Derrière ces tensions se cache aussi une réalité financière préoccupante. Camtel, bien qu’ayant le monopole du déploiement et de la gestion de la fibre optique au Cameroun, traverse une passe difficile. Avec une dette colossale estimée à 600 milliards de francs CFA en 2022 et un accès limité aux financements, l’opérateur historique peine à moderniser son infrastructure. Or, dans un monde où la connectivité est devenue un besoin fondamental, ces lacunes pèsent lourdement sur l’ensemble du secteur numérique camerounais.

Quelle issue pour les consommateurs ?

En attendant une solution, ce sont les usagers qui subissent les conséquences de cette guerre des responsabilités. Si les entreprises se rejettent la faute, les abonnés, eux, continuent de payer pour un service qui ne répond pas à leurs attentes. Cette crise souligne la nécessité d’une réforme en profondeur du secteur, avec une meilleure régulation et des investissements stratégiques pour garantir une connectivité fiable à tous les Camerounais.

Désormais, la balle est dans le camp des autorités et des opérateurs. Faute d’actions concrètes, la frustration des consommateurs risque de se transformer en défiance généralisée vis-à-vis du secteur des télécommunications. Une issue que personne ne souhaite, mais qui semble inévitable si des solutions rapides et durables ne sont pas mises en place.

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici