Alors que les avancées technologiques révolutionnent nos quotidiens, elles ouvrent également la voie à des risques accrus en matière de cybersécurité. Un récent rapport publié par KnowBe4 met en lumière un paradoxe inquiétant : bien que les utilisateurs africains d’appareils connectés se disent confiants quant à leur capacité à détecter les fraudes en ligne, ils restent particulièrement vulnérables aux attaques sophistiquées orchestrées par des cybercriminels de plus en plus organisés.

Une confiance trompeuse face à une menace en pleine expansion

Les chiffres sont édifiants. Si 83 % des personnes interrogées dans sept pays africains (Maroc, Nigeria, Afrique du Sud, Ghana, Égypte, Kenya et Botswana) affirment savoir reconnaître une tentative de cyberattaque, la réalité du terrain raconte une tout autre histoire. Plus d’un tiers (35 %) d’entre eux ont déjà perdu de l’argent à cause d’une escroquerie en ligne, et nombre d’entre eux ont été victimes d’hameçonnage (phishing), de désinformation ou de fraude téléphonique.

Cette surestimation de leurs compétences en matière de cybersécurité s’explique en partie par l’effet Dunning-Kruger, un biais cognitif bien connu qui pousse les individus à se croire plus compétents qu’ils ne le sont réellement dans des domaines où leur expertise est limitée. Ce phénomène est d’autant plus préoccupant que les attaques deviennent plus sophistiquées et plus difficiles à détecter, notamment avec l’émergence de la « fraude en tant que service » (fraud-as-a-service).

Ces nouvelles plateformes, accessibles sur le dark web, offrent aux cybercriminels des outils leur permettant d’usurper des identités, de manipuler l’information et d’exploiter les failles des systèmes de sécurité avec une facilité déconcertante. L’intelligence artificielle (IA) est d’ailleurs de plus en plus utilisée pour générer du contenu trompeur, rendant les escroqueries encore plus convaincantes et difficiles à identifier.

Des comportements à risque en hausse.

L’un des constats les plus préoccupants du rapport concerne l’évolution des comportements des utilisateurs face à la cybersécurité. Alors qu’en 2023, 29 % des personnes interrogées affirmaient être très réticentes à partager leurs informations personnelles en ligne, ce chiffre a chuté à seulement 14 % en 2024.

Une part non négligeable des utilisateurs reconnaît partager leurs données en échange d’avantages perçus, comme des réductions sur des achats ou des services gratuits. Certains vont même jusqu’à divulguer des informations personnelles sans aucune contrepartie. Ces pratiques, souvent motivées par un manque de sensibilisation aux risques encourus, exposent ces utilisateurs à des menaces telles que le vol d’identité ou l’usurpation de leurs comptes bancaires.

Le rapport souligne également une légère baisse de la compréhension des bonnes pratiques en matière de sécurité numérique. L’usage de mots de passe complexes, pourtant fondamental pour se prémunir des attaques, est en recul (de 62 % en 2023 à 58 % en 2024), tandis que la connaissance de l’authentification multifacteur stagne autour de 58 %.

Une prise de conscience en hausse, mais encore insuffisante

Malgré ces vulnérabilités croissantes, l’inquiétude face à la cybercriminalité progresse. En septembre 2024, 58 % des personnes interrogées se déclaraient « très préoccupées » par les menaces en ligne, soit une augmentation significative par rapport aux 29 % enregistrés un an plus tôt.

Les principales craintes exprimées par les sondés reflètent bien la gravité du phénomène : près de la moitié redoutent de perdre de l’argent à cause d’une fraude, tandis que 26 % s’inquiètent du vol d’identité. D’autres, à hauteur de 18 %, sont particulièrement soucieux de la sécurité numérique de leurs proches, notamment de leurs enfants, qui évoluent dans un environnement numérique de plus en plus dangereux.

Mais au-delà de la peur, c’est la méconnaissance des moyens de protection qui inquiète le plus. 7 % des personnes interrogées admettent ne pas savoir comment se prémunir contre les cyberattaques, ce qui laisse la porte ouverte aux escrocs en ligne.

Un appel urgent à la sensibilisation

Face à cette montée en puissance des cybermenaces, la nécessité d’une éducation numérique renforcée n’a jamais été aussi pressante. Si la technologie évolue à une vitesse fulgurante, les mentalités et les habitudes doivent impérativement suivre le même rythme.

Les entreprises et les gouvernements africains ont un rôle clé à jouer dans cette lutte en multipliant les campagnes de sensibilisation et en mettant en place des mesures incitatives pour encourager l’adoption des bonnes pratiques en ligne. Les utilisateurs, quant à eux, doivent apprendre à questionner leur propre niveau de connaissance et adopter une posture plus prudente face aux tentatives de fraude.

La cybersécurité n’est pas une question de confiance aveugle, mais bien de vigilance constante et d’apprentissage continu. Dans un monde où les cybercriminels affûtent sans cesse leurs stratégies, seule une prise de conscience collective et une approche proactive permettront de limiter les dégâts.